Les Clématites à grandes fleurs
(1884) Page(s) 9-12, pl. IV. Includes photo(s). CLEMATIS HAKONENSIS - TAB. IV. CLEMATIS HAKONENSIS Franch. et Savat., Enum. plant. in Japon., spont. cresc, II, p. 2(334 (1). Frutex validus, sarmenlosus ac volubilis, trunco caulibusque lignosis. Folia 5-juga, rarius 3-7, in ramis floriferis aliquando simplicia, segmentis ovalibus, longe acuminatis, ad basim rotundo v. cordiformiterattenuatis, integris aut aliquantum 2-3 lobatis, supra atroviridibus glabrisque v. leviter pollinariis, infra pallidioribus et undique villosis. Petiolis elongatis, dense pilosis, vix contortis; petiolulis crassis, minoribus et ad basim obliquis, superne cirrhiferis. Flores eximii, C. patentis floribus acqui, violacei v. violaceo-purpurei, 4-6 sepalis, submembranaceis, ellipticis, v. obovato-ellipticis, utrinque attenuatis v. rolundatis, ad apicem undulatis mucronatisque, in medio carinatis, intus gtabris, subter ad margines intense velutinis, inter nervos parce pubescentibus. Stamina plurima erecta,filamentis planis albis glabrisque,antheris sublinearibus cinereis, glabris, connectivohastato proeminente. Carpella multa, stamina superantia, rigida, pilis setosis adpressisque tecta, ovariis exiguis, stylis brevibus, stigmatibus majoribus, attenuatis glabrisque. Achainiae reniformes, cauda longa, rostellata, recta nec non contorta. In Japonia, Nippon, invenita. DESCRIPTION.—Le C. hakonensis, remarquable par sa puissante végétation, émet de longs rameaux sarmenteux et volubiles, capables d'atteindre le sommet des arbres de haute taille qu'ils ne tardent pas à couvrir. Le tronc s'épaissit promptement et devient bientôt ligneux. Les feuilles sont composées de 5, rarement 3-7 segments, régulièrement ovales, légèrement atténués et arrondis ou subcordiformes à la base, longuement acuminés au sommet, presque toujours entiers ou très exceptionnellement bi-trilobés. Leur face supérieure, d'un vert foncé, en général terne, reste constamment glabre ou présente quelquefois une apparence poussiéreuse, qui ne persiste pas. Une épaisse villosité tapisse complètement leur face inférieure, dont la coloration atténuée paraît beaucoup plus pâle. Les dimensions des segments varient beaucoup suivant qu'il s'agit des feuilles prises sur les tiges, ou de celles qui garnissent les rameaux florifères; les premiers atteignent facilement une longueur de 12 à 15 centimètres sur une largeur de 4 à 5, tandis que les autres ont au plus de 4 à 6 de long sur 2 à 3 de large. On trouve à la base des inflorescences, mais principalement sur les rameaux terminaux, des feuilles simples, très courtement pétiolées, dont la forme et la grandeur ne diffèrent pas des segments des feuilles pennatiséquées. Les pétioles et pétiolules sont recouverts de poils courts et serrés; leurs dimensions varient beaucoup. Les premiers, épais surtout à leur base, s'amincissentet se contournent plus ou moins à leur extrémité. Les pétiolules des segments inférieurs, obliquement dressés, ne servent que rarement à fixer la plante, tandis que ceux du sommet de la feuille s'allongent quelquefois beaucoup et deviennent cirrhifères. Les pédoncules chargés de poils semblables à ceux que garnissent les pétioles s'allongent toujours beaucoup (16 à 20 centimètres); quoique exactement dressés jusqu'à la moitié de leur croissance, ils s'infléchissent et se courbent bientôt à une faible distance de leur sommet, de telle sorte que le bouton est renversé et nutant; mais vers l'époque de l'anthèse le pédoncule se relève et la fleur reprend, lors de son épanouissement,la position normale. Tout aussi remarquables que celles des espèces précédentes, les fleurs du C. hakonensis, franchement violettes, quelquefois d'un violet rouge, pourpré ou bleuâtre, n'ont pas moins de 12 à 15, ou même 18 centimètres de diamètre. Leurs sépales, presque membranacés, au nombre de quatre, plus rarement cinq ou six, sont elliptiques ou obovales, parfois presque rhomboïdaux, atténués ou arrondis aux deux extrémités et terminés par un acumen aigu, quelquefois légèrement recourbé. Une villosité fort épaisse, surtout vers les bords, tapisse leur face extérieure, à l'exception toutefois de la partie médiane, comprise entre les nervures, qui est simplement parsemée de poils épars; la face intérieure est complètement glabre. Les étamines, en nombre indéfini, mais beaucoup plus restreint que chez les espèces précédentes, sont toujours dressées. Leur filet blanc, atténué à ses deux extrémités, supporte une anthère sublinéaire, glabre et d'un gris roussâtre, dont le connectif se prolonge en une pointe hastée très accusée. Les carpelles,réunis en un lâisceau dressé,surpassent quelquefois un peu les étamines, à cause de la longueurde leur style. L'origine de cette Clématite ne m'a été révélée que dernièrement; je l'avais décrite et déjà nommée, sans pouvoir indiquer sa patrie; je soupçonnais toutefois que son introducteur anonyme, frappé seulement de la couleur de ses fleurs, mais, faute d'un examen suffisant, l'avait confondue avec l'une des autres espèces à grandes fleurs de l'extrême Orient, le C. patens ou le C. florida, probablement,et qu'elle devait par conséquent provenir du Japon. J'ai donc constaté avec un extrême plaisir le bien fondé de mes prévisions, lorsque je reconnus ma plante parmi celles recueillies par M. le docteur Savatier, dont je dois la communicalion à l'obligeance de son collaborateur, M. Franchet, auquel je suis heureux de pouvoir adresser ici mes sincères remerciements. Le C. hakonensis a été recueilli par M. le docteur Savatier sur les collines rocheuses, près de Odawara, dans l'île de Niphon. Le C. hakonensis fit son apparition dans les jardins vers 1860; le premier pied cultivé à Segrez, acheté à Angers, y fut planté en 1861; je reçus successivement deux autres pieds l'année suivantesous les noms de C. viticella violacea et C. patens rubra; quelque temps après, l'espèce devenait tout à fait en vogue et ses variétés recevaient les noms, bientôt très répandus, de Jackmani, rubella, purpurea hybrida, etc., etc. La littérature horticole accueillit avec une juste faveur la nouvelle venue; malheureusement,comme son histoire restait ignorée, on entreprit de lui en forger une et l'on ne tarda pas à déclarer qu'elle provenait du croisement des C. lanuginosa, C. Hendersoni et C. viticella var. atrorubens (2). Il est inutile de faire ressortir ce qu'a d'invraisemblable cette triple descendance; mais, comme l'origine hybride de la nouvelle espèce est généralement admise, bien que connaissant désormais exactement l'origine de cette belle plante, il me paraît à propos de la discuter. Lorsque l'on parvient à créer un végétal hybride, c'est-à-dire un produit dont l'ascendance femelle appartient à une espèce différente de celle qui constitue l'ascendance mâle, on se trouve en présence d'un être vivant, en général stérile, ou du moins exceptionnellement fertile et alors fort inconstant. On est donc réduit à le multiplier artificiellement,soit par le bouturage, soit par la greffe. Quant au semis, si quelques graines possèdent la faculté germinative, les nouveaux individus ne restent pas intermédiaires pour la plupart, mais font retour à l'un de leurs parents ou se modifient tout au moins dans cette voie de retour aux ascendants. Le C. hakonensis n'est pas dans ce cas, tant s'en faut; ses graines sont toujours nombreuses, germent facilement et reproduisent l'espèce presque sans variation. Si les nouvelles venues présentent quelques modifications, ce n'est que dans la grandeur ou la couleur des sépales. Cette preuve, tout expérimentale, est déjà bien convaincante ; mais admettons un moment cette hypothèse très invraisemblable de la fécondité constante d'un hybride, qui se comporterait donc comme une véritable espèce : notre Clématite proviendrait dès lors du croisement du C. lanuginosa et du C. viticella ou C. eriostemon (C. Hendersoni). Il faut tout d'abord éliminer la dernière de ces espèces, qui appartient à une section toute différente, n'est pas grimpante, offre des fleurs cylindriques et diffère si profondément par l'ensemble de ses caractères, qu'il est inutile de s'arrêter, même un moment, à la supposition qu'elle ait pu concourir à la formation de la plante à fleurs étalées qui nous occupe; il suffit de se rappeler les belles recherches de M. Naudin pour se convaincre de l'impossibilité d'une telle association. Quant aux deux autres espèces, les C. lanuginosa et C. viticella, considérés comme les ascendants du C. hakonensis, il faut examiner comment leurs caractères seraient répartis dans la nouvelle venue, ainsi créée de toutes pièces. Le C. hakonensis se rapproche du C. lanuginosa par la forme et la grandeur de ses fleurs, ses pétioles et pédoncules poilus, tandis que la couleur violette ou rouge violacé, souvent plus ou moins bleuâtre des sépales, est assez analogue à celle des fleurs du C. viticella; mais là se borne toute l'analogie de ces Clématites, et les caractères propres à notre plante ne se retrouvent ni chez l'une ni chez l'autre de ces deux espèces, qui ne sauraient être considérées comme intermédiaires.Le C. hakonensis, tout d'abord, atteint des dimensions bien plus grandes que les espèces auxquelles on attribue sa descendance, et dont la hauteur paraît limitée. Les segments des feuilles diffèrent par leur forme, leur grandeur, leur texture même; les étamines sont dressées et dominent les carpelles; enfin les achaines réniformes, munis d'un long style persistant, ordinairement dressé, restent propres uniquementà la nouvelle espèce. Il paraît inutile de pousser plus avant cet examen comparatif, d'où il résulte que, saufl a forme et la couleur des fleurs, il n'y a presque rien de commun entre le C. hakonensis et les espèces auxquelles on attribuait bénévolement son origine. S'il eût été possible de conserver quelques doutes sur l'entité spécifique du C. hakonensis et de le considérer encore comme un produit hybride, on pourrait s'éclairer en étudiant le tempérament même de la plante, qui diffère beaucoup de celui des espèces gratuitement considérées comme ses ascendants. Celles-ci sont en effet originaires de contrées froides ou tempérées, remarquables par une chaleur estivale très intense et ne se rencontrent que dans des endroits secs et chauds : le C. lanuginosa habite en effet le nord de la Chine (3) et le C. viticella l'Europe méridionale (4). Ces deux plantes ont une végétation de très longue durée, que les premiers froids de nos contrées viennent toujours surprendre en pleine activité. Le C. hakonensis, tout au contraire, accomplit facilement dans le courant d'une saison normale le cycle de sa période végétativeet trouve sous le climat maritime de l'Angleterre des conditions singulièrementfavorables. Ne devons-nous pas en conclure que nous sommes en présence d'une espèce appartenant à la flore d'un pays dont les variations de températuresont limitées, qui a un climat plus ou moins maritime ou tout au moins un peu humide, et dont les chaleurs de l'été ne deviennent jamais excessives? Aussi étais-je bien fondé à supposer pour le C. hakonensis la même origine que pour le C. patens, dont il a en effet le tempérament et avec lequel, comme nous l'avons dit, on l'a probablement confondu. Quoi qu'il en soit, il reste certain que l'histoire de cette espèce est celle d'une quantité de plantes de nosjardins : elles sont introduites inconsciemment et attendent souvent fort longtempsavant que leur origine et la voie par laquelle elles nous sont parvenues puissent être définitivement établies.
(1) A l'heure même où je venais de remettre le manuscrit de cette étude à l'impression (8 octobre 1883), j'ai reçu en communication de M. Franchet, les échantillons de Clématites recueillies au Japon par son ami et collaborateur le docteur Savatier. C'est ainsi que j'ai pu examiner le C. hakonensis et acquérir la certitude que la plante introduite depuis plus de vingt ans dans les cultures européennes et que j'avais déjà décrite et même nommée (je lui donnais le nom de C. ameles, à cause de l'obscurité qui entourait son origine), appartenait bien à la flore du Japon. Il ne peut subsister le moindre doute sur l'identité de cette Clématite,bien que l'échantillon, à rencontre de tous les autres, qui sont remarquablement beaux, soit petit et incomplet. L'absence de feuilles raméaires, de boutons et d'achaines n'autorise pas une entière conviction à cet égard; mais, je le répète, mes présomptions sont très fortes : les feuilles ne paraissent différer que par un peu moins d'ampleur, car leur forme et leur texture sont les mêmes; les bractées, ainsi que le font remarquer MM. Franchet et Savatier, sont semblables aux segments des feuilles et constituent une sorte d'involucre placé au-dessous du milieu des pédoncules, caractère différentiel important, qui s'observe pareillement chez la plante cultivée; enfin l'examen des fleurs ne m'a révélé aucune différence, bien qu'elles scient un peu plus petites et qu'il ne m'ait pas été possible de juger leur couleur : sépales absolument semblables, conservant le même léger espacement; enfin mêmes étamines, mêmes pistils. Les seules différencesde dimensions des feuilles et des fleurs n'ont que bien peu de valeur, car l'échantillon a été récolté au Japon sur une plante à l'état spontané (in sepibus), tandis que les miens proviennent non seulement de plantes cultivées,mais encore de plantes peut-être déjà modifiées par la sélection horticole. En résumé, je répète qu'il me parait des plus probables que l'espèce répandue dans nos jardins n'est autre que la plante recueillie au Japon par M. le docteur Savatier. (2) Moore et Jackman, Clemat.,p. 9 (3) In declivitatibus lapidosis collium.— R. Fortune, n° 62. (4) Ad sepes et dumeta Europea callidioris. D. C. Prodr. I, p. 9.
(1884) Page(s) 16-19, pl. V. Includes photo(s). CLEMATIS FLORIDA - TAB. V ET VI CLEMATIS FLORIDA Thunb., Flor. jap., p. 240. — Lamk., Encycl. meth., II, p. 45.— Wild., Spec, II, p. 1-2X7. — Jacq., Hort. Schoenb., III, p. 57, tab. 357. — Andr., Bot. repos., tab. 402. — Sims., Bot. Mag., tab. 834. — Desf., Hist. des Arbres, I, p. 308. — De Cand., Syst., I, p. 160; Prodr., I, p. 8. — Herb. de l'Amat., V, p. 7. — Sieb. et Zucc, Fl. jap. fam. nat., p. 68. — Rev. hort., 1856, tab. 3. — A. Gray, in Perry's Exped. and in Wells Williams and Morrow plants Jap., p. 305. — Miq., Prol., p. 190. — Maxim., Diagn. pl. nov. Jap. et Mandsch. in Bull. Acad. des sc. de St.- Pétersb., 1877, p. 590. C. ANEMONOIDES Houtt., Pfl. syst., VII, tab. 55, fig. 1. ATRAGENE INDICA Desf., Cat. hort., Paris, éd. 1, p. 123. A. FLORIDA Pers., Syn. II, p. 98. VITICELLA FLORIDA Spach, Veget. Phaner., VII, p. 264. Frutex debilis, sarmentosus, caulibus striatis, novellis purpureis glabrisque. Folia longe petiolata, bi-juga,rarius binatim quaternatimve secta, segmentis sessilibus v. peliolulatis, ovalis v. subcordiformibus, attenuatis v. etiam acutis aut subobtusis, integris, rarius parce incisis v. bi-trilobatis, lucide-viridibus, villosis. Folia bracteolia simplicia, sessilia aut brevissimc petiolata, segmentis similia. Flores violaceo-purpurei v. albi aut lutescentes (typica), sepalis ovato-rhomboidalibus v. obovatis, attenuatis, rarius acuminatis, mucronulatis. Stamina permulta,glabra, filamentis complanatis, albis v. rubescentibus, antheris lineo-lanceolatis, purpureis. Carpella plurima, staminibus breviora, purpurea quoque, velutina, ovario minimo, stylo erecto et superne recurvo. Achainiae siccæ, ruberrimae, cauda sericeo-velutina, breviter attenuata et ad apicem incurvata. C. florida varietates floribus solitariis aut ternatis, simplicibus, diverso modo plenis, distinctas praebet. In Japonia septentrionali, in saxosis Nipponis mediae locis dicitur conterranea, sed in hortis frequenter natatur.
DESCRIPTION.— Quoique grimpante et volubile, cette espèce reste relativement petite, et ses tiges, bien que nettement ligneuses, n'atteignent qu'une hauteur limitée, qui n'excède pas 3 ou 4 mètres. Ses feuilles raméaires pennées, en général tri-ternées (exceptionnellement à 5 paires de segments), offrent un pétiole très grêle, long de 8 à 10 centimètres, plus ou moins cirrhifère, qui se courbe au point où est fixée la première paire de segments. Ceux-ci, ovales-arrondis, subcordiformes à la base, s'atténuent longuement à leur sommet; ce sommet est tantôt aigu, tantôt subobtus. La longueur du segment varie de 3 à 5 centimètres sur 15 à 20 millimètres au plus de large; les latéraux sont sessiles ou très courtement pétiolules, bien qu'ils offrent dans une variété un véritable pétiolule; l'intermédiaire est constamment plus ou moins longuement pétiolulé; ces segments, toujours presque membranacés, assez fermes et d'un vert un peu clair, bien que luisants, sont également tapissés sur les deux faces de poils couchés et mous. Les feuilles des ramules florifères, toujours simples et conformes aux segments des autres feuilles, quoique plus souvent bi-trilobés, sont étroitement réunis par paire (rarement au nombre 3), de manière à former une sorte d'involucre à la base ou au milieu d'un pédicelle nu. La couleur des fleurs du C. florida a toujours été considérée comme blanche ou lactée ; Thunberg, qui le premier l'a fait connaître,n'avait pu observer que des individus cultivés, dont les sépales sont en effet, chez la plupart de celles-ci, d'un blanc crémeux, mais rien n'est moins certain que cette couleur soit celle de la plante à l'état spontané, puisqu'il existe une variété à fleurs d'un pourpre violet, comme nous le verrons un peu plus loin, et que, dans les duplicatures de la même espèce, les étamines transformées offrent constamment cette couleur, qui me paraît devoir être celle de la plante sauvage. Les sépales régulièrement ovales, plus ou moins rhomboïdales,souvent même obovales, atténués ou même acuminés au sommet et terminés par un long mucron, sont minces, presque membranacés. Quoique nettement étalés, leurs bords restent quelquefois, avant l'anthèse, légèrement contournés intérieurement, ce que nous n'observons chez aucune des espèces de la section précédente. Les étamines, étalées et divergentes, sont formées d'un filet blanc et d'une anthère d'un pourpre brunâtre, de dimensions égales, et glabres; elles atteignent à peine au tiers de la hauteur du calice. Les carpelles, très nombreux, dressés et pourpres, restent encore plus petits; presque entièrement recouverts par les étamines au moment de l'épanouissement de la fleur, ils n'apparaissent que lorsqu'elle est complètement étalée. Ils sont formés d'un ovaire très petit et d'un style cylindrique s'amincissant graduellement de manière à s'effiler vers son extrémité stigmatifère, qui, extérieurement, est recourbée à son sommet. Les achaines conservent la couleur pourpre des carpelles, qui devient toutefois un peu plus sombre encore. Très plats, ellipsoïdes ou presque deltoïdes, ils s'atténuent en un style persistant court et dressé, progressivement atténué et recourbé en dehors à son extrémité ; chaque achaine plus ou moins parsemé de petits poils soyeux (jamais plumeux), promptement caducs. Comme nous le disions à propos de la couleur des fleurs, il paraît probable que cette plante, très cultivée dans le pays même d'où elle est originaire, ne nous est connue que par des variétés jardiniques. Nous avons vu que celle décrite par Thunberg avait des fleurs d'un blanc crémeux; un peu plus tard on introduisit une variété à fleurs pleines, également blanches (4); enfin, en 1837, un horticulteur anglais annonça une nouvelle forme, dans laquelle David Don vit une espèce différente, qu'il nomma C. Sieboldi (2). La demi-transformation des étamines en organes pétaloïdes ne constitue qu'une monstruosité, sorte de duplicature, promptement reconnue par Lindley, qui donna à cette variété le nom de bicolor, à cause de la couleur pourprée de l'androcée transformé. Ces dernières variétés ne sont pas rares dans les cultures européennes; mais je n'ai pu retrouver le premier type introduit, celui à fleurs normales et blanches décrit par Thunberg. Je me suis vainement adressé aux jardins botaniques et aux horticulteurs de diverses contrées d'Europe; j'ai fouillé maints vieux jardins; la plante a désormais disparu, quoique son introduction ne puisse être mise en doute, puisqu'il en existe, dans l'herbier du jardin du Muséum d'histoire naturelle de Paris, un échantillon provenant des serres de notre grand établissement scientifique. Un examen poursuivi sans relâche des nombreuses Clématites de la collection de Segrez n'a pas tardé à me révéler que deux plantes fréquemment cultivées dans les jardins, où faute de renseignements sur leur origine on les considère comme des hybrides, un examen attentif, dis-je, m'a bientôt fait reconnaître que les Clématites, généralement ésignées sous les noms de C. viticella venosa et C. insignis, appartiennent au C. florida, sans qu'il puisse y avoir la moindre hésitation à cet égard. La couleur rouge-violacé que nous avons déjà constatée chez les étamines pétaloïdes de la variété bicolor, s'étend là aux sépales eux-mêmes. A l'exception de la couleur et de la grandeur du calice, l'entité des caractères de la fleur chez ces deux variétés et chez celle du C. florida type, reste rigoureusement semblable: même forme des sépales, mêmes étamines, mêmes carpelles; les fruits n'offrent pas davantage quelque particularité distinctive. Les feuilles seules, ainsi que, pour l'une des deux variétés, la disposition des ramules florifères, offrent des différences réelles, mais toutefois d'ordre secondaire. Ces plantes, en effet, ont leurs feuilles munies d'un nombre plus considérable de segments (en général 5 au lieu de 3), lesquels sont toujours pétiolulés, comme du reste ceux de la variété bicolor que nous avons déjà examinés plus haut, et non plus sessiles ou subsessiles, paucidentés ou même presque lobés (3). Quant à la différence dans la disposition des fleurs, elle n'existe qu'à l'égard de la variété venosa, chez laquelle les ramules florifères sont distribués trichotomiquement. C'est assurément là une différence plus considérable, mais qui paraît bien moindre, si l'on considère que c'est, pour ainsi dire, le seul caractère qui différencie ces deux variétés à fleurs violettes. Celle appelée insignis conserve, en effet, les fleurs solitaires du C. florida type. N'existe-t-il pas d'ailleurs de nombreux exemples analogues chez diverses espèces phanérogames? les Sida, Ceanothus, Cucurbita, etc., nous fourniraient plusieurs de ces exemples. Peut-il subsister quelques doutes sur l'origine de ces deux plantes? Peut-on admettre que les légères différences qui les caractérisent puissent autoriser à les considérer encore comme des hybrides? Plusieurs ouvrages horticoles prétendent qu'elles proviennent du croisement des Atragene alpina et Clematis patens. De la première espèce si profondément différente, les nouvelles venues ne révèlent aucun caractère, pas même la couleur de leur fleur, dont les sépales sont bleus ou presque rosés et les pétales blanchâtres. Quant au C. patens, est-il nécessaire de revenir sur cette grande espèce, pour démontrer qu'elle n'a de commun avec les plantes qui nous occupent que la nature étalée de ses fleurs ? Le C. florida, ainsi que ses variétés à fleurs colorées que nous venons d'examiner, paraissent plutôt intermédiaires entre deux espèces appartenant à des sections différentes, dont elles ont en effet emprunté quelques caractères; il paraîtrait plus à propos, en effet d'admettre que ces plantes proviennent des C. patens et C. viticella. La forme étalée des fleurs du premier, le feuillage et le mode de végétation du second se retrouvent en effet chez le C. florida. Mais encore serait-il facile d'anéantir une pareille supposition, car les étamines, les carpelles et les achaincs diffèrent profondément chez les unes et les autres, sans que l'on puisse invoquer le plus léger point de contact. Ne devons-nous pas, dès lors, persévérer dans cet enseignement et reconnaître que, lorsqu'ils'agit de décrire des espèces litigieuses, il y a tout intérêt à les étudier à l'état vivant, et à ne jamais négliger de rechercher les caractères différentiels des divers organes floraux ? Il ne nous paraît donc pouvoir subsister aucun doute sur la place que doivent occuper, parmi les Clématites, les deux plantes que nous venons de signaler, bien qu'il ne m'ait pas été possible, comme à l'égard de plusieurs autres, d'acquérir expérimentalement de nouvelles preuves. Ces variétés ne donnent, en effet, que fort rarement, quelques fruits qui mûrissent toujours incomplètement.Les partisansde l'hybridité trouveraient peut-être là une raison à invoquer, si je ne m'empressais d'ajouter qu'il en est absolument de même du C. florida, dont aucun herbier ne possède de fruits, qu'aucun auteur ne décrit,et que je ne suis parvenu à obtenir sur mes pieds vivants qu'avec les plus grandes difficultés. En résumé, bien que je n'ai pu examiner qu'un petit nombre d'achaines, il m'a néanmoins été permis de constater qu'il n'existait pas la moindre particularité distinctive entre ceux du pied type et ceux provenant des variétés à fleurs violettes. Quoique le Clematis florida, cultivé partout au Japon, appartienne sûrement à sa flore, il n'est pas encore certain que des voyageurs aient signalé la plante croissant à l'état spontané. D'après MM. Franchet et Savatier (4), cette belle espèce aurait été découverte près de Scinada (5), dans l'île de Niphon, croissant au milieu des rochers; nous n'avons aucune raison pour mettre le moindrement en doute leur assertion ; mais il ne nous a pas été donné d'en vérifier l'exactitude, les échantillons de cette provenance n'existant ni dans l'herbier du Muséum, ni dans celui de Kew. En résumé, il reste probable que les conditions d'habitat du C. florida, comme celles de ses congénères à grandes fleurs étalées, sont assez spéciales pour que l'aire d'extension de l'espèce soit très restreinte.
(1) C. florida flore pleno. — Jacq., Hort. Schoenbr.,tab. 357 (2) C. Sieboldi, Don in Sweet, Brit. flow.,II, tab. 396. — Fl. des Serres, V, tab. 489. — Rev. hort., 1856, p. 21.- Paxt. Mag. of Bot., III, 1837, p. 147, cum Icon. — Moor, et Jackm. Clem., tab. 16. C florida Thunb. var. bicolor Lindl. Bot. Reg., XXIV, tab. 25. La variété bicolor se distingue en outre par ses tiges plus ou moins poilues, par ses segments latéraux pétiolulés, presque toujours entiers, mais largement dentés. Ses étamines sont toutes transformées en des sortes de pétales, fort petits, aigus, dont l'ensemble simule une véritable rosette. (3) Dans la variété venosa les feuilles sont souvent légèrement teintées de violet foncé sur leurs bords ou le long des nervures. (4) Franch. et Savat., Enum.plant, in Jap. spont. cresc., p. 2. (5) La plante a été observée à l'état de culture dans cette même localité par MM. Wells William et Harrow, collecteurs américains. A. Gray, loc. cit.
(1884) Page(s) 18, pl. VI. Includes photo(s). CLEMATIS FLORIDA ... ....La couleur des fleurs du C. florida a toujours été considérée comme blanche ou lactée ; Thunberg, qui le premier l'a fait connaître,n'avait pu observer que des individus cultivés, dont les sépales sont en effet, chez la plupart de celles-ci, d'un blanc crémeux, mais rien n'est moins certain que cette couleur soit celle de la plante à l'état spontané, puisqu'il existe une variété à fleurs d'un pourpre violet, comme nous le verrons un peu plus loin, et que, dans les duplicatures de la même espèce, les étamines transformées offrent constamment cette couleur, qui me paraît devoir être celle de la plante sauvage..... Un examen poursuivi sans relâche des nombreuses Clématites de la collection de Segrez n'a pas tardé à me révéler que deux plantes fréquemment cultivées dans les jardins, où faute de renseignements sur leur origine on les considère comme des hybrides, un examen attentif, dis-je, m'a bientôt fait reconnaître que les Clématites, généralement ésignées sous les noms de C. viticella venosa et C. insignis, appartiennent au C. florida, sans qu'il puisse y avoir la moindre hésitation à cet égard. La couleur rouge-violacé que nous avons déjà constatée chez les étamines pétaloïdes de la variété bicolor, s'étend là aux sépales eux-mêmes. A l'exception de la couleur et de la grandeur du calice, l'entité des caractères de la fleur chez ces deux variétés et chez celle du C. florida type, reste rigoureusement semblable: même forme des sépales, mêmes étamines, mêmes carpelles; les fruits n'offrent pas davantage quelque particularité distinctive. Les feuilles seules, ainsi que, pour l'une des deux variétés, la disposition des ramules florifères, offrent des différences réelles, mais toutefois d'ordre secondaire. Ces plantes, en effet, ont leurs feuilles munies d'un nombre plus considérable de segments (en général 5 au lieu de 3), lesquels sont toujours pétiolulés, comme du reste ceux de la variété bicolor que nous avons déjà examinés plus haut, et non plus sessiles ou subsessiles, paucidentés ou même presque lobés (*). Quant à la différence dans la disposition des fleurs, elle n'existe qu'à l'égard de la variété venosa, chez laquelle les ramules florifères sont distribués trichotomiquement. C'est assurément là une différence plus considérable, mais qui paraît bien moindre, si l'on considère que c'est, pour ainsi dire, le seul caractère qui différencie ces deux variétés à fleurs violettes. Celle appelée insignis conserve, en effet, les fleurs solitaires du C. florida type. N'existe-t-il pas d'ailleurs de nombreux exemples analogues chez diverses espèces phanérogames? les Sida, Ceanothus, Cucurbita, etc., nous fourniraient plusieurs de ces exemples.
(*) Dans la variété venosa les feuilles sont souvent légèrement teintées de violet foncé sur leurs bords ou le long des nervures.
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